Spider je n'ai pas regardé le film hier car je me doutais qu'il serait dur à voir.
Maintenant que je l'ai vu je peux faire quelques remarques sans pour autant vous dévoiler tout le contenu.
A voir, même s'il est dérangeant!
Il montre bien la difficulté, voir l'impossibillité d'enseigner dans un collège dit sensible, le mal être des profs, mais aussi des élèves.
A l'IUFM, on nous fait des beaux discours, on a des formations genre "gérer les élèves difficiles" mais cela ne prépare pas à la réalité du terrain!
Dans ce genre d'établissements, vouloir enseigner sans tenir compte des élèves, c'est peine perdu! On n'est pas pédagogue avant tout, mais, éducateur, flic!
Le prof qui arrive en se disant je fais mon cours, va se planter à coup sûr! Il faut d'abord tenir compte du public que l'on a en face de soi! Et c'est bien le problème de la prof dans le film. Elle a oublié une chose: si ses élèves ne la respectent pas, elle ne pourra rien construire avec eux. Et c'est la raison de son mal être et ce qui la pousse à faire ce qu'elle fait. Elle refuse d'abandonner en partie ses idéaux: enseigner sa matière, défendre les valeurs de l'école publique (la laïcité)...
Elle a oublié une chose importante: les élèves d'aujourd'hui ne sont plus ceux d'il y a 20 ans, ceux que l'on était! Ce n'est plus à eux de s'adapter à son cours; mais c'est à elle d'adapter son cours à ses élèves! C'est malheureusement la réalité actuelle dans ce genre d'établissement.
Dans le film, on va d'autres catégories de profs: celui qui fait copain copain avec les élèves en particulier, celui-là aussi il se plante! Les élèves ne le respectent pas non plus.
Et puis il y a le chef d'établissement qui ne soutient pas ses profs. Il ne pense qu'à descendre la prof pour sauver ses fesses. Pour lui, même si il sait que la situation est très tendue dans son établissement, il ne fait rien: signaler les travers va faire qu'il va être mal noté par sa hiérarchie! Il préfère laisser couler!
Les élèves eux habitent un quartier difficile, sensible: l'école est un passage obligé étant donné qu'elle est obligatoire jusqu'à 16 ans. On voit bien les deux catégories d'élèves: ceux qui veulent s'en sortir et travail un minimum pour cela mais ils sont écrasés par le poids des caïds qui pourrissent l'ambiance de la classe et qui empêchent tout travail,font pression sur les élèves qui aimeraient travailler.
Et puis il y a les sujets dérangeants: la violence dans les établissements scolaires, le racket, le viol, les menaces verbales... Et là, aucun prof ne peut être armé pour ce genre de situation; on fait de notre mieux pour gérer.
Moi je m'estime heureusement d'enseigner dans un petit collège de campagne. On est relativement épargné par ces problèmes. Ici le problème c'est le niveau de pauvreté des familles et le manque de motivation des élèves qui du coup ne travaillent quasiment pas à la maison. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de violence. Mais elle est localisée et ne concerne que des faits épisodiques. On arrive encore à canaliser les troubles fêtes!
Quand j'ai fini mon année de stage il y a 3 ans, j'ai attendu de voir où j'allais être mutée la peur au ventre. J'avais de forte chance d'être TZR (c'est-à-dire remplaçante) ou avoir un poste fixe dans un établissement difficile. Comme je l'ai dit à Jpp, je crois que je serai tombée en dépression tout de suite. Ce qui arrive à beaucoup de profs débutants qui sont nommés dans ce genre d'établissements. Mais j'ai eu une bonne étoile qui m'a envoyé en Thiérache, au fin fond de la campagne de l'Aisne.
Le système est mal fait: les collègues qui ont assez de points (car enseignants depuis quelques années) demandent à muter dans des établissements "corrects", les jeunes profs n'ont pas de points et prennent ce qui reste, c'est-à-dire dans des établissements comme dans le film. Mais ils essayent dès l'année suivante d'en partir. Il y a très peu de profs qui y restent par choix!
Il existe une cellule psychologique dans chaque rectorat, mais soit les profs ne la connaissent pas, soit ils n'osent pas la contacter de peur d'avoir ensuite leur inspecteur sur le dos!
Pour ma part, j'ai été confronté à de la violence verbale envers moi lors de ma première année d'enseignement dans l'établissement rural où j'étais en complément de service. La situation avec quelques élèves d'une classe s'est dégradée au cours du dernier trimestre. Comme la prof dans le film, j'en étais malade le matin avant de partir car je savais que j'allais en baver. Rien n'y faisait même pas l'aide du principal. Quand j'ai su que l'année suivante, je ne serai plus dans l'établissement, j'ai laissé couler. Je faisais mon cour pour ceux qui avaient envie de bosser (une bonne majorité de la classe) et les autres prennaient la porte ou faisaient ce qu'ils voulaient à partir du moment où ils ne perturbaient pas le cour! Je n'allais pas y laisser ma santé!!!!
Voilà mon poids de vue!!!!
Je me rends compte que j'ai été très bavarde. Mais j'avais envie de vous éclairer sur notre quotidien de profs.
Jpp, tu comprends maintenant pourquoi avec si peu de points, je ne veux pas demander ma mutation: je risque de me retrouver dans ce genre d'établissements et ça, je ne le supporterai pas.
Je me dis que malgrè l'isolement, j'ai la chance d'avoir des élèves qui sont des anges même si ils sont chiants parfois!!!!